| | |

SOLIDARITÉ - Le dispositif Hom'Up accueille dans deux appartements nantais, les jeunes chassés de chez eux car victimes d'homophobie ou transphobie.

Selon une étude de l'Institut National d'études démographiques (Ined), les jeunes LGBT (Lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) sont plus touchés par les violences intrafamiliales que les autres, en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. 

Cette homophobie et transphobie ont bien souvent pour conséquence une rupture familiale. Bien que le gouvernement ait annoncé un plan d'urgence pour reloger les personnes LGBT qui ont été chassées de chez elles, les structures comme Le Refuge, l'une des associations les plus célèbres, manquent. 

Pour renforcer ce manque de place d'hébergement, l'association Aurore, expérimente depuis 2018 à Nantes, le dispositif Hom'UP. Dans deux appartements de la ville, les jeunes LGBT entre 18 et 25 ans, en situation de rupture familiale, bénéficient d'un hébergement d'urgence et d'accompagnement social. Pour en savoir plus, nous avons interrogé Yoann Hardy, travailleur social pour Hom'Up. 

18h39 : Pendant le confinement, plusieurs associations ont interpellé le gouvernement pour renforcer le dispositif d'hébergement d'urgence des jeunes LGBT à cause de la recrudescence de l'homophobie au sein de leur propre famille. Avez-vous été davantage sollicité à cette période ? 

Yoann Hardy : Tout à fait. On a assisté à une recrudescence des demandes de candidature pour le dispositif Hom'Up pendant le confinement. Cela s'explique par le fait que ces jeunes étaient coincés avec leurs parents. Leur relation qui était déjà tendue a pu se développer en quelque chose de plus malsain, toxique et dangereux pour ces jeunes. 

Et le problème, quand ces jeunes sont recueillis dans des structures classiques , ils sont en proie là aussi à l'homophobie et la transphobie. C'est pour cela qu'est né le dispositif ? 

Le dispositif est né d'un constat : les solutions pour les jeunes LGBT en situation de rupture familiale ne sont pas adaptées à ce public. Il faut un accompagnement spécifique, notamment en ce qui concerne l'accompagnement vers la transition pour les jeunes transgenres. On ne retrouve pas cet accompagnement dans les structures classiques. Pour les jeunes gays, il peut être difficile de se développer car dans les centres d'hébergements il peut y avoir de l'homophobie. L'idée était de créer un safe space, un endroit où il est possible d'être soi même en toute sécurité. 

Les jeunes LGBT sont-ils plus vulnérables que les autres jeunes face à l'exclusion et à la précarité ? 

Complètement. De fait, certains restent chez leurs parents alors même que le climat y est extrêmement toxique. Par peur de s'orienter vers ce type de structure, ils préfèrent rester dans leur environnement familial parce qu'il n'y a pas de réponse adaptée. Ils choisissent le moindre mal en restant chez leurs parents, alors que ça reste compliqué. 

Les jeunes que vous recueillez ont entre 18 et 25 ans. Dans quel état se trouvent-ils lorsqu'ils arrivent chez vous ? 

En général, s'ils en viennent à contacter l'association c'est qu'ils sont dans un état de détresse important. On a des profils très différents, il y a des jeunes qui viennent de l'aide sociale à l'enfance, de foyers et d'autres qui viennent de structures familiales plus classiques mais qui ont reçu une réponse très négative de leurs parents quand ils ont fait leur coming out. Il y a ce choc à cause du rejet de la famille. 

Et on a des personnes étrangères qui ont fui leur pays car elles étaient persécutées du fait de leur orientation sexuelle. C'est brutal de se faire mettre dehors par ses parents tout comme devoir quitter son pays en catastrophe car on est menacé de mort. Quand on les récupère, ils sont dans des états psychologiques assez bas. 

Vous avez deux appartements dans lesquels cohabitent en tout 6 jeunes LGBT. Comment vivent-ils cette cohabitation ? 


Les cohabitations se passent bien. Ils peuvent échanger sur leur vécu car ils vivent des situations parfois assez similaires. Ensemble, ils se sentent beaucoup moins seuls que dans un appartement isolé. En tant que travailleur social, je mets en place des temps collectifs : des repas, des sorties culturelles. L'objectif c'est de se sentir moins seul. 

Ce sont des jeunes à qui il a fallu du courage pour parler de leur homosexualité ou de leur transidentité et qui ont subi un rejet. Il y a une énorme solitude à laquelle on essaie de pallier. D'où nos relations avec d'autres associations LGBT pour les faire participer à des temps communs avec d'autres jeunes.