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DÉCO FAITE MAISON - Après avoir travaillé dans la finance, Manon a tout quitté pour réaliser son rêve : fabriquer sa propre déco et inspirer les gens.

Loin d'être mère de tous les vices, l'oisiveté dévoile au contraire tous les talents. Sans le confinement de 2020, Manon Thonnard n'aurait sans doute pas sauté le pas aussi jeune pour changer de vie en se lançant dans le DIY comme blogueuse. "Le bricolage, ça a toujours été une passion chez moi, nous confie-t-elle, je voulais être décoratrice d'intérieur quand j'étais plus jeune, et puis j'ai fait un master en marketing qui m'a permis de trouver un job dans la finance au Luxembourg. Pendant le Covid, je me suis retrouvé au chômage forcé, seule avec moi-même. Ça m'a fait beaucoup réfléchir !"

Dans un premier temps, Manon est un peu déboussolée, elle pense qu'elle n'a pas de "talent particulier", alors elle bouquine des livres de développement personnel et se souvient qu'elle a toujours aimé la déco. En parallèle de son travail, elle lance un compte Instagram dédié au DIY, Home Inspiration by MT, qui grandit peu à peu. Tout commence dans son ancien appartement avec un banc en palettes de récup', puis une petite table, puis encore un autre DIY, des idées et inspirations de déco qu'elle poste sur ses réseaux sociaux et sur son blog.

142 000 abonnés, des échasses et Pinterest

Dès juillet 2021, Manon peut démissionner pour se lancer à 100% et ensuite déménager dans la ville de Liège, car elle a suffisamment d'audience, environ 20 000 abonnés à l'époque. Une petite communauté, mais très fidèle et surtout qui ne cesse de grandir pour atteindre 142 000 abonnés aujourd'hui ! Bref, trois ans plus tard après ses débuts, cette jeune Belge a réussi sa reconversion professionnelle puisqu'elle vit de son activité, même si elle travaille ponctuellement comme coach Instagram ou comme social media manager.

Quand on lui demande d'où lui vient sa passion et ses connaissances pour le bricolage, Manon répond sans coup férir qu'elle doit beaucoup à son père... et un peu à sa mère, mais pas pour les mêmes raisons ! "Mon père était électricien et il aimait bricoler. Par exemple, quand je lui demandais un jouet, il le fabriquait au lieu de l'acheter si c'était possible, je me souviens qu'il m'avait confectionné une paire d'échasses, parce que j'en voulais ! Mes parents sont séparés et ma maman, à l'inverse, n'est pas du tout bricoleuse, du coup c'est moi qui montais les meubles qu'elle commandait quand j'avais 8 ans."

Mais c'est en mettant la main à la pâte pendant le confinement que la jeune femme a le plus appris, en testant, en regardant des tutos sur YouTube, en s'inspirant sur Pinterest... Et puis il a fallu s'équiper, acheter des outils, apprendre à filmer. "Peu à peu, raconte-t-elle, je me suis procuré du matériel, même si j'ai commencé avec une scie sauteuse à bas prix qui n'était pas top, depuis j'ai investi dans une scie professionnelle, dans une ponceuse électrique, une perceuse visseuse, etc. Idem pour les matières, au fil des tutos DIY, je finis par avoir du stock et ça me sert plus tard, comme de la peinture ou du cannage, par exemple."

Des DIY divers et variés : meuble upcyclé, toile en relief, lampes...

Dans son appartement liégeois de 65 m2 sans cave, pas facile de stocker les outils, les DIY et les chutes de matériel, d'ailleurs. Alors Manon en conserve une partie chez sa mère, tandis que l'autre est rangée chez elle dans des boites en plastique à glisser sous le lit, qui sont compartimentées. Une boite pour la peinture acrylique, une autre pour le plâtre, etc. "Je sais dans quelle boite trouver quel type de matériau et j'essaie que ce soit bien trié. Quand je crée un DIY, il faut que j'en aie vraiment besoin, car ils vont être chez moi au moins un an minimum, et après j'en fais profiter les amis et la famille. C'est cadeau !"

Manon propose même ce qu'elle appelle "La brocante de Home Inspi" : la possibilité pour un abonné de récupérer un DIY chez elle, comme une table d'appoint, une chaise upcyclée, etc. Il faut dire que Manon s'est spécialisée les petits DIY faciles à réaliser et à emporter, même si elle s'attaque aussi à des projets plus grand, comme un tapis organique ou un meuble trouvé dans la rue et upcyclé !

Pour vivre, Manon fait notamment des partenariats pour customiser ses DIY, exemple ici avec Dremel, qui lui prêté son Stylo +, un outil multi-usage polyvalent qui lui a permis de percer dans un vase en verre pour faire passer les fils électriques de la lampe qu'elle a fabriquée.

Les coulisses des tutos, la garantie du succès

Sur Instagram, Manon aime partager toutes les étapes de son travail avant de montrer le résultat "J'essaye de partager le processus créatif en story, ça montre que c'est pas aussi facile qu'on croit, précise-t-elle. Parfois les gens pensent que ce n'est pas un vrai travail, mais là, j'assume que c'est un métier à part entière. Récemment, j'ai réalisé une toile en relief, je la vois depuis des années sur des comptes DIY, c'est super beau et ça a l'air facile. J'ai acheté du grillage de poule, je me suis rendu compte que c'était trop rigide, je me coupais, ça perçait la toile, rien n'allait... Alors j'ai continué mes recherches, ça a pris des semaines pour trouver le bon grillage, mais il fallait encore recouvrir de plâtre et j'ai galéré car j'avais trop de plis ! Sur mon blog, je détaille tout, pour que les gens ne fassent pas les mêmes erreurs."

Ces coulisses, où Manon partage avec sa communauté ses réflexions, voire lui demande des conseils sur l'orientation à suivre, c'est ce qui fait le succès de son compte. "Je me rends compte qu'ils aiment suivre le tuto pas à pas, jour après jour, car si je fais une collab' et que la marque ne veut pas que j'en parle avant, ça fonctionne moins bien." Autre gros carton, les tutos qui utilisent une matière première originale, un bon moyen de titiller la curiosité des internautes. Exemple avec le pouf que Manon a fabriqué à partir de frites de piscine récupérées ! "Les gens me voient avec les frites et se demandent où je veux en venir, ça crée une forme de suspense. Ensuite, ils voient le résultat, un pouf recouvert de cordes, et ils sont bluffés !"

Au fil du temps, Manon sent bien que le public se lasse de petits tutos tels que les vases ou les vide-poches, qu'elle doit viser plus haut. Alors elle fait des DIY plus ambitieux, qui prennent du temps et peuvent perdre en accessibilité. D'où parfois une volonté de revenir aux basiques : "Récemment, j'ai fait un vase avec du plâtre dans un sac plastique de congélation, c'était tout bête mais ça a bien plu à mes abonnés justement."

Une déco éco-responsable, c'est compliqué, mais c'est possible

Et le futur dans tout ça ? "J'aimerais acheter une maison, nous répond l'influenceuse, avoir mon atelier, un endroit pour faire de la poussière ! Quand j'utilise du plâtre, ensuite il faut faire un grand nettoyage, c'est usant. Tout est fait un peu avec les moyens du bord. Je n'ai pas d'extérieur, pas de terrasse, donc pour la peinture si je bombe ou si je ponce, c'est pas top non plus. En été, je vais chez des amies qui ont un jardin si je veux fabriquer un tuto d'extérieur." Vivre en ville comporte toutefois quelques avantages : À Liège, les beaux magasins de design sont nombreux, et Manon habite à côté d'une ressourcerie très dynamique.

De façon générale, notre bricoleuse préfère se fournir en matériel de récup' pour proposer des DIY éco-responsables, car elle trouve que la déco neuve n'est pas encore assez sensibilisée à ces questions. Elle aime upcycler d'anciens objets inutilisés, elle récupère son bois dans une matériauthèque de la ville, fait attention aux polluants dans les produits qu'elle utilise. "Je ne suis pas parfaite, relativise-t-elle avec humilité, parfois j'ai besoin de bombes de peinture, ce qui n'est pas écolo, tout comme le ruban adhésif, c'est du plastique, mais j'essaye de montrer qu'on peut se faire une chouette déco à petits prix quand on réutilise ce qu'on a déjà autour de soi !"