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UPCYCLING - Jan Körbes y a vécu trois ans et demi. La preuve qu'il n'y a pas de limite à l'imagination, mais aussi qu'on peut donner une seconde vie à tous les objets.

Comment Jan Körbes en est-il venu à transformer un silo à grains en maison ? Pour le comprendre, il faut savoir que son jeu favori est de s'inspirer des objets qui l'entourent pour imaginer des habitations qui sortent de l'ordinaire.

Attablé dans un café de Berlin, en Allemagne, l'architecte néerlandais en fait la démonstration avec un enthousiasme communicatif.

Ce stylo en métal par exemple, qu'il tourne et retourne entre ses doigts. Sa forme lui inspire une maison flottante, tout en hauteur, avec la pointe immergée sous les eaux. "Il n'y a pas de limite, on peut construire tout ce que l'on veut !", s'exclame-t-il.

Jan Körbes, architecte au sein du collectif Refunc.

Jan Körbes, architecte au sein du collectif Refunc. © Refunc

Jan Körbes ne se contente pas de rêver. Il s'attache, avec le collectif Refunc, à donner une seconde vie aux objets.

C'est ainsi qu'un silo à grains, croisé dans la campagne aux Pays-Bas, est devenue une maison confortable. Il y a vécu, pendant 3 ans et demi, avec sa fille Liuka. "C'est la meilleure expérience de notre vie", résume-t-il.

Une maison plus grande qu'il n'y paraît

Jan Körbes achète le silo en 2013 à un fermier pour 300 euros. Il le fait transporter en camion jusqu'à Berlin et l'installe sur le campus de la ZKU, le centre des Arts et de l'Urbanisme.

Vue plongeante sur le rez-de-chaussée.

Vue plongeante sur le rez-de-chaussée. © Ishka Michocka

Une fois posé à la verticale sur 4 pieds, ce grand cylindre de plastique ne semble pas plus accueillant. Et, détail non négligeable, il ne fait que deux mètres de diamètre.

À l'intérieur du silo, avant transformation.

À l'intérieur du silo, avant transformation. © Jan Körbes

Ce reportage tourné à l'époque, montre la transformation du silo en accéléré :

Étape essentielle, Jan Körbes ajoute des cloisons tout autour du silo. Des rangements viennent se caser entre ces murs extérieurs et les parois du silo lui-même. Pour qu'on puisse attraper les objets, l'architecte découpe des niches dans le silo et installe des étagères.

La chambre à l'intérieur de la maison-silo.

La chambre à l'intérieur de la maison-silo. © Ishka Michocka

Il installe ensuite un nouveau sas d'un mètre carré qui sert à la fois d'entrée, de toilettes et de douche. L'architecte ajoute également un étage à l'intérieur du silo, pour loger une petite chambre. L'espace de vie passe ainsi de 8 à 13 m2.

La maison-silo sur le campus de la ZKU à Berlin.

La maison-silo sur le campus de la ZKU à Berlin. © Jan Körbes

La surface au sol a beau être réduite, Jan Körbes ne s'y sent pas à l'étroit. Dans cette habitation tout en hauteur, il peut s'étirer à loisir. Et puis, le mur d'escalade pour accéder à l'étage donne l'occasion de faire un peu de sport !

Avec sa fille, ils s'adaptent à merveille à leur étrange environnement. "On avait l'impression d'être dans un vaisseau spatial", raconte-t-il aujourd'hui.

Une sensation que l'on retrouve à travers ces photos de la maison-silo :

En levant la tête vers l'étage où se trouve la chambre.

En levant la tête vers l'étage où se trouve la chambre. © Ishka Michocka

Son credo : récupérer et valoriser les objets destinés à la poubelle

La maison-silo est aussi un manifeste en faveur de l'upcycling, cette démarche qui consiste à réutiliser des matériaux et des objets destinés à la poubelle, sans les broyer ni les fondre, comme on le fait d'habitude lorsque l'on recycle.

Tout, ici, a donc été récupéré et parfois transformé. Par exemple, une baignoire est installée dans un trou sous la table. Elle n'est pas là pour que l'on se lave, mais pour que l'on puisse s'asseoir sur le sol, en laissant pendre ses pieds à l'intérieur.

Le silo en route pour Berlin, avant sa transformation.

Le silo en route pour Berlin, avant sa transformation. © Jan Körbes

"Avec l'industrialisation, on a perdu le contact que nous avions vis-à-vis des objets fabriqués à la main, estime Jan Körbes. Pourtant, il y a toujours des gens et du travail humain derrière ces objets, ne serait-ce que pour fabriquer les machines. S'il s'agissait d'objets artisanaux, on ne les jetterai pas, alors pourquoi le faire avec des objets industrialisés ?"

Pour aller plus loin dans l'écologie, la douche est alimentée par l'eau de pluie. Un chauffage à infrarouge fournit une chaleur agréable tout en consommant peu d'énergie. Celle-ci peut d'ailleurs être fournie par 4 panneaux solaires, lorsque la maison-silo n'est pas reliée au réseau électrique.

© Ishka Michocka

L'architecte a fini par déménager pour habiter dans une maison classique avec sa compagne. Mais il retourne parfois passer une nuit dans sa maison-silo avec Liuka, qui a aujourd'hui 10 ans.

D'ailleurs, il s'attaque à présent à détourner un nouveau silo à grains, plus petit :

Cette fois, il deviendra une maison de thé miniature, installée à côté de la maison-silo. Rendez-vous dans quelque temps à Berlin pour un moment méditatif, dans ce drôle de vaisseau spatial ouvert à tous.