|

RÉNOVATIONS INSPIRANTES - Birgit et Mathias Mahnke ont un talent : révéler tout le potentiel des bâtiments de briques abandonnés, encore nombreux en ex-Allemagne de l'Est.

Quand Mathias Mahnke énumère les acquisitions faites avec sa femme, on mesure à quel point tous deux sont passionnés d'architecture industrielle. Deux anciennes usines à Leipzig, transformées en galeries d'art et espaces de coworking à Leipzig, un ancien hôpital à Zeitz, à une cinquantaine de kilomètres de là, dans lequel ont été aménagées plusieurs dizaines de chambres à louer, une autre à Zeitz, petite ville non loin de là, devenue résidence d'artistes.

Il faut dire que dans cette région, les bâtiments laissés à l'abandon après la réunification de l'Allemagne et la chute du bloc soviétique ne manquent pas. Ni les bonnes affaires. “Une ancienne usine peut coûter 1 euro !”, nous assure notre collectionneur avisé. Bien sûr, il faut des capitaux importants, jusqu'à plusieurs millions d'euros, pour la rénovation. Mais ce coût est à mettre en relation avec la surface qui dépasse à chaque fois la dizaine de milliers de mètres carrés.

Et Mathias, consultant auprès d'entreprises, sait à la fois comment valoriser ces bâtiments : en les louant à des artistes et des start-ups une fois rénovés, mais aussi, en amont, en limitant le coût des travaux. 

L'une des anciennes usines rachetées par le couple, à Leipzig. © Mahnke

Un style brutaliste, qui plaît aux amateurs

Laisser les murs nus, ne surtout pas lisser les défauts ni repeindre, c'est autant de main d'œuvre en moins sur les chantiers. Cela donne aussi une déco au caractère bien trempé. “Le style brutaliste, qui fait ressortir toute la matérialité du béton et de la brique ”, explique Mathias. Ce style, les amateurs d'architecture et de vieilles briques peuvent s'y plonger en louant pour quelques nuits l'un des lofts aménagés par le couple, à l'occasion d'un voyage en Allemagne. Ou bien l'expérimenter à domicile, en piquant quelques-unes des idées déployées ici, facilement reproductibles, même quand on n'a pas d'usine sous la main. 

Matériaux bruts et câbles apparents, incontournables de la déco industrielle

Leur rénovation peut-être la plus originale est cet ancien atelier de fabrication de pâtes datant de 1909, situé à Zeitz, en Saxe-Anhalt. Cette ville industrielle florissante à l'époque de la RDA est devenue ville fantôme, avec le départ des entreprises et des habitants après 1990. En rachetant ces bâtiments imposants mais totalement vides il y a encore 5 ans, Mathias et Birgit ont participé à insuffler une nouvelle vie dans la ville. 

L'ancienne usine de pâtes à Zeitz. © Mahnke

Certes, il fallait une certaine imagination pour imaginer un lieu accueillant à la place des gravats. Mais pour Mathias, ce genre de bâtisse a de nombreux avantages : “Une usine est construite de façon extrêmement solide, elle est souvent aussi bien isolée, les pièces sont la plupart du temps intactes et surtout, grandes et organisées de façon rationnelle.”

Parfait donc pour aménager des ateliers et des espaces de travail, mais aussi deux lofts parfaitement représentatifs du style industriel. “Notre point de départ, avec le brutalisme, est d'agir de la manière la moins invasive possible, de détruire le moins possible, pour ne pas avoir à reconstruire”, expose Mathias. Seules les couches inutiles sont retirées, le sol en plastique par exemple, pour laisser apparaître la chape de béton. 

Le petit conseil déco pour imiter Birgit et Mathias

Comment adopter cette tendance du “trash wall” (mur décrépi en français) chez soi si l'on ne veut pas retirer tout revêtement ? La solution peut être de laisser à nu seulement une paroi qui ne donne pas sur l'extérieur, ou encore d'apposer du papier peint à motif effet béton.
Murs bruts, chape de béton et infrastructure technique apparente dans ce loft. Crédit : Mahnke

Les câbles électriques courent sur les murs, ce qui évite d'avoir à percer, puis reboucher les trous, poncer, puis repeindre. Les briques sont omniprésentes, même si une partie est tout de même repeinte en blanche, pour plus de luminosité.

L'espace est laissé ouvert, dans le plus pur esprit loft. Crédit : Mahnke
L'espace nuit est seulement délimité par les câbles des lampes qui encadrent la tête de lit. Crédit : Mahnke
On retrouve les indispensables de la déco industrielle dans cet autre loft, mais aussi plus de couleur. © Mahnke

Un esprit loft, certes, mais chaleureux et confortable

“Le style industriel est en soi assez froid, mais si l'on met l'accent au bon endroit avec une touche de couleur, que l'on accroche des tableaux aux murs, cela peut devenir très confortable”, apprécie Mathias, en saluant au passage le travail de sa femme, qui s'occupe de l'aménagement et de la décoration intérieure. 

Démonstration dans un autre loft rénové par le couple, cette fois dans une ancienne imprimerie à Leipzig. 

L'ancienne imprimerie Springer und Möller à Leipzig après rénovation. Crédit : Mahnke

Là, Birgit a imaginé différents espaces dans la grande pièce ouverte. Ils sont délimités visuellement à l'aide de tapis moelleux. Placés sous une table ou encore sous un fauteuil, ils créent une petite frontière, tout en réchauffant le sol de béton. 

Le petit conseil déco pour imiter Birgit et Mathias

Le mieux est de privilégier les tapis anciens, mais il est possible aussi de dénicher des tapis d'inspiration berbère comme celui-ci
Crédit : Mahnke

Pour créer un peu d'intimité, l'espace nuit est caché derrière une cloison. Mais attention, celle-ci ne monte pas jusqu'au plafond pour ne pas recréer une pièce fermée.

Conseil aménagement

Les cloisons Alara de Castorama se posent sans percer et se déclinent sous différentes options (fenêtre, demi-cloison, claustra…). De quoi dissimuler ou révéler plus ou moins.
Une autre astuce pour plus de chaleur : multiplier les coussins de toutes les tailles. Crédit : Mahnke
Et pourquoi pas un abat-jour en tissu, pour changer du métal ? Crédit : Mathias Mahnke

Pour chacun de leurs projets, le couple s'efforce de récupérer le plus possible les matériaux présents sur place.

Par exemple, les poutres d'une ancienne toiture en bois sont toutes indiquées pour construire une table. La plupart des luminaires ont aussi été trouvés sur place.

Une table récup' trône dans la salle à manger de cet autre loft à Leipzig. Crédit : Mahnke

Leur démarche, du gros œuvre à la déco, peut donc se résumer ainsi : réutiliser, éviter le plastique, privilégier les matériaux solides et la seconde main.

“La moitié de la consommation de l'énergie d'un bâtiment se fait au moment de la construction. Un bâtiment neuf, quelle que soit la façon dont il est construit, aura toujours un impact écologique plus important qu'un bâtiment ancien que l'on aura laissé en place”, rappelle Mathias. 

Au-delà de l'esthétique, voilà donc un argument tout rationnel, qui achèvera de nous convaincre du charme des bâtiments industriels !