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OLD SCHOOL - En Normandie, JB et sa compagne ont rénové une école de 1881 en respectant le plus possible son histoire.

Même ses manières polies et la tonalité élégante de sa voix semblent venir d'une autre époque. Marin sur des ferries reliant la France et l'Angleterre, Jean-Bernard n'aime la terre que lorsqu'elle laisse parler son histoire et son âme du fond des âges. Alors quand il aperçoit sur Le Bon Coin cette école-mairie du XIXe siècle située non loin de Dieppes, à quelques encablures de la mer, son coeur fait des vagues. Utilisée jusque dans les années 80, la mairie a servi ensuite d'entrepôt pour la déco de Noël du village. "Ce qui était bien avec la maison, c'est qu'il y avait tout à faire", se souvient ce chineur du dimanche qui confesse ne rien connaître ou presque au bricolage.

"J'aime restaurer le bois, détaille malgré tout JB, mais comme tout le monde, un peu de peinture, du ponçage. J'aime faire mes propres produits d'entretien pour rénover, c'est plus éco-responsable. J'ai un certain attrait pour le mobilier ancien, je suis bénévole chez Emmaüs, ça m'aide à garder l'œil et à récupérer ce qui n'est pas vendu." Alors comment en est-il venu à rénover avec sa compagne Laëtitia cette bâtisse dans un style aussi rétro, mêlant carrelage imitation carreaux de ciment, moulures ornementées en staff, parquet en bois, commode des années 30, malles anciennes Moynat ou Lavoet pour la déco ?

C'est en réalité la maison qui a dicté les choix et orientations de JB, qui fonctionne "à l'instinct". Un engrenage, devenu aussi une passion : "Je suis tombé dans la folie de remettre la maison comme elle était avant, s'amuse notre accro au vintage. Ce n'est pas facile de se documenter sur l'intérieur de la maison ! Pour l'extérieur, on avait des cartes postales anciennes, car c'était une école et une mairie, ça aide. On voit bien qu'il y a une âme, c'était une école de garçons, c'est un peu fantomatique quand on y pense, c'est atypique et ça nous ressemble."

Ancienne carte postale de l'école pour garçons qui faisait office aussi de mairie © Alix
La façade de l'école aujourd'hui © Alix
Avant / Après : la salle de classe © Alix
La salle de classe aujourd'hui, avec les malles anciennes dans un coin © Alix

Quand la mairie devient un boudoir bibliothèque

Comment relever un tel défi de rénovation ? Comment conserver l'esprit d'antan d'une maison atypique de 200 m2 ? Tout d'abord, il faut casser intelligemment. Pas question de se la jouer moderne avec des ouvertures partout. "On a voulu conserver les pièces telles qu'elles étaient, raconte Jean-Bernard, on ne voulait pas ouvrir les murs, ni faire une cuisine américaine, on voulait garder le côté enfilade de pièces en pièces". Ainsi, la salle de classe est devenue un salon, la partie mairie un boudoir-bibliothèque et l'habitation du milieu est restée la maison principale.

Faute de clichés détaillés de l'intérieur, JB a improvisé au fur et à mesure que les pièces se dévoilaient, décorant la maison à la mode rétro sans forcément tout faire à son goût. Encore une fois, c'est l'esprit du lieu qui commande : "Si on vend la maison un jour, explique-t-il, c'est aussi important que les gens se retrouvent dedans et se projettent. Dans la salle de bains, par exemple, c'est un style rétro qu'on n'aurait pas forcément choisi pour une autre maison : un parquet d'époque, une baignoire à sabots, de la robinetterie en inox à l'anglaise."

Contrairement à L'Ecole de la mer, un autre projet de rénovation d'école que nous avions visité non loin de chez lui, la rénovation de Jean-Bernard nécessitait moins de travaux : "Notre projet était moins rocambolesque, on a pu conserver l'existant du bâti au maximum et on n'a pas eu besoin de remplacer les fenêtres. C'est juste l'isolation qu'il a fallu améliorer, on a ré-isolé les murs, ré-enduit les plafonds, et fait un devis pour un poêle à granulés style rétro." Avec 3,60 m de hauteur sous plafond, la facture aurait pu devenir salée les mois d'hiver !

Avant / Après de la mairie devenue bibliothèque © Alix
Avant / Après salle à manger © Alix
Avant / Après salle de bains © Alix

"Le minimalisme, c'est bien mais pas pour moi"

Mais vous l'avez compris, le grand atout de la maison, c'est la déco ! Une décoration 100% chinée sur les brocantes ou sur Internet. Alors quels sont les péchés mignons de Jean-Bernard? "Je suis un dingue des miroirs, j'en ai une quantité phénoménale... J'adore aussi les malles, les livres anciens, l'argenterie, je collectionne les vieux meubles, j'achète d'abord et je vois où je mets l'objet ensuite, je marche à l'envers. Je trouve ça bien le minimalisme, mais ce n'est pas pour moi."

Cette folie vintage, Jean-Bernard la partage sur son compte Instagram. "Quand je l'ai créé, c'était surtout pour prendre contact avec les gens en auto-rénovation et obtenir des conseils, explique celui qui se surnomme marin d'O douce. Par exemple, j'ai appris comment récupérer et entretenir la brique auprès d'un spécialiste. Idem pour la chine et la brocante, on partage nos idées, on se dit comment réparer un vieux miroir au mercure, on se montre nos coups de folie. Récemment j'ai acheté une suite innombrable de chaises de jardin, ça m'amuse d'échanger avec les copains."

Côté prix de la maison, le propriétaire préfère rester discret, mais il recommande d'acheter un bien communal : "C'est toujours plus intéressant ! Une mairie, une salle des fêtes, un château d'eau, vous y gagnerez forcément." Pour les travaux, il a fallu patienter un an avant d'investir totalement la maison, qui va encore évoluer : le préau va devenir un gîte et le garage une salle de sport. "Pour moi, il faut construire avec des matériaux de qualité pour éviter de saccager la rénovation, conclut Jean-Bernard. "Un jour, la maison sera rachetée, les goûts auront changé, mais les matériaux de qualité vont durer. La maison tient debout depuis très longtemps, ce serait dommage de gâcher ça."