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SOLIDARITÉ - Familles Solidaires permet à des particuliers d'investir pour des logements à destination des personnes handicapées selon le principe de la finance solidaire.

Placer son argent tout en faisant une bonne action ? La finance solidaire permet ce tour de force. Il ne s'agit pas de faire fortune, mais bien de soutenir un projet local et social, tout en bénéficiant de réductions d'impôts.

La société Familles Solidaires a choisi ce système pour récolter les fonds nécessaires à la construction de logements individuels pour personnes handicapées.

Tout est parti d'un constat : face à la pénurie de places en établissements spécialisés pour adultes handicapés, une grande majorité des personnes cérébrolésées retournent vivre chez leurs parents après leur accident.

Une situation souvent difficile à vivre pour les aidants familiaux, qui s'occupent au quotidien de leurs proches handicapés. D'autant que ces derniers doivent avoir accès à un logement personnel pour gagner en autonomie.

C'est l'idée défendue par Jean Ruch, qui préside l'AFTC Alsace, l'Association des Familles de Traumatisés Crâniens et Cérébrolésés, et gère bénévolement Familles Solidaires.

Il nous expose les rouages de la finance solidaire, qui permet de la concrétiser.

Le projet de résidence sénior de Familles Solidaires à Riedisheim.

Le projet de résidence sénior de Familles Solidaires à Riedisheim. © avec l'aimable autorisation de CKD

Comment est née l'idée de financer des logements individuels pour personnes handicapées ?

Il faut 10 ans pour créer un nouvel établissement spécialisé, et les 15 ou 20 places disponibles sont aussitôt utilisées par les enfants des membres de l'administration.

Notre idée était donc de faire des opérations immobilières en milieu ordinaire, de remettre les personnes handicapées au coeur de la ville. L'avantage, c'est que pour ce type de logements, nous n'avons pas besoins de demander des autorisations aux Agences Régionales de Santé.

En 2010, l'opportunité s'est présentée d'acheter un premier appartement dans l'immeuble K'Hutte, construit en autopromotion à Strasbourg. Huit familles ont créé une société en commandite et investi ensemble 100 000 euros. (Cinq personnes y emménageront bientôt en colocation et un deuxième appartement individuel a été financé dans le même bâtiment, ndlr.)

On s'est dit que cette expérience était reproductible. Pouvoir financer des logements pour des personnes vulnérables avec l'épargne de particuliers, ça peut intéresser des porteurs de projets locaux. Donc nous avons continué notre collecte et aujourd'hui nous en sommes à 52 actionnaires pour 450 000 euros.

En quoi consiste le financement solidaire ?

Aujourd'hui Familles Solidaires est un outil de collecte national que nous mettons à disposition des associations locales, pour acheter, construire ou rénover des biens.

Ces logements seront loués à destination des personnes vulnérables, quel que soit leur handicap, ou à des personnes âgées. Les épargnants achètent des actions Familles Solidaires à partir de 100 euros.  

Si les actionnaires demandent à retirer leur argent, la société a prévu un fonds de liquidité de 25% du capital social (si 100 000 euros nous sont confiés, 25 000 euros restent en argent “liquide” libérable rapidement). Le remboursement fonctionne si d'autres actionnaires entrent, Familles Solidaires a donc décidé de lancer son premier appel public à l'épargne.

Vue intérieure du projet de résidence sénior de Familles Solidaires à Riedisheim.

Vue intérieure du projet de résidence sénior de Familles Solidaires à Riedisheim. © avec l'aimable autorisation de CKD

Investir dans Familles Solidaires donne-t-il le droit à un logement ?

Pas du tout. Parmi les huit familles qui ont investi au début, aucune n'a logé de proche dans les appartements que nous avons achetés, c'est un investissement désintéressé.

Alors quelles sont les contreparties ?

Ce n'est pas un don. Les actionnaires bénéficient de 18% de réduction fiscale, à condition de laisser leur argent 5 ans dans la société. Si l'on paie l'ISF, on a même droit 50% de réduction fiscale. Mais beaucoup de nos épargnants ne paient pas d'impôts.

L'intérêt est surtout de soutenir un projet solidaire et local, qui va permettre à des personnes vulnérables de se loger. Les actionnaires ne toucheront pas de dividendes. Nous prévoyons seulement de revaloriser le prix de l'action au niveau de l'inflation, pour ne pas qu'ils perdent de l'argent.

Et à partir du moment où la société fait des bénéfices, elle réinvestit cet argent dans de futurs projets. C'est à la fois de l'économie sociale et solidaire et de l'économie circulaire.

Après le financement de deux appartements dans l'immeuble K'Hutte à Strasbourg, quel est votre nouveau projet ?

Nous avons décidé d'aller plus loin pour favoriser l'autonomie des personnes âgées en participant à la création d'une résidence séniors à Riedisheim, en Alsace. Il s'agit d'un foyer de logements qui sera géré par l'association Apalib.

Nous allons y acheter deux appartements, que nous destinons à des personnes handicapées vieillissantes. Elles pourront bénéficier des services de la maison de retraite située juste en face.

Nos appartements seront très équipés en domotique. Nous prévoyons l'ouverture automatique des portes, des volets roulants, des détecteurs de chute... Nous recherchons encore 200 000 euros pour les financer.