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ÉGALITÉ - Dans les couples LGBT les tâches ménagères sont mieux réparties. Toutefois cette utopie égalitaire prend fin à l'arrivée du premier enfant...

Les couples LGBT (lesbien, gay, bi, trans) sont plus égalitaires que les autres, lorsqu'il s'agit de la répartition des tâches ménagères à la maison. Une étude prouve que 76% des couples de même sexe déclarent partager les tâches quotidiennes contre 31% pour les couples hétérosexuels.

Et si les couples hétérosexuels s'en inspiraient ? Alors que le débat sur l'inégale répartition des tâches ménagères entre les hommes et les femmes fait rage, il semblerait que les couples LGBT échappent à ces problématiques.

Pour Sébastien Chauvin, sociologue et co-auteur de Sociologie de l'homosexualité (Ed. La Découverte, 2013) “l'absence de script” au sein des couples LGBT permet d'engager un dialogue sur la répartition des tâches. “Il peut y avoir des inégalités dans ces couples mais elles sont moins inscrites dans des rôles de genre qui sont considérés comme donnés”, souligne-t-il.

Ne pas recréer les schémas traditionnels

Emil, 30 ans et son mari Yo sont les heureux papas du petit Arsène, âgé de 20 mois. Emil, qui documente la vie de sa famille sur la chaîne Youtube Papapapou, évoque les publicités dans lesquelles sont véhiculées des stéréotypes sur le rôle que doit tenir un père ou une mère dans la famille. “On essaie de ne pas recréer les schémas traditionnels, c'est la société qui genre les tâches domestiques”, explique-t-il.

En d'autres termes, les couples LGBT tentent de ne pas reproduire les stéréotypes de genre qui relèguent la femme aux tâches d'intérieur tandis que les hommes se chargent des travaux extérieurs.

Les couples que nous avons interrogés insistent sur le fait que la répartition des tâches au sein du couple se fait en fonction des appétences et des capacités de chacun. Parce que Pierre, 30 ans, n'aime pas le jardinage, il délègue cela à son mari Romain, 43 ans, qui lui s'occupe souvent de la vaisselle.

Les couples de même sexe sont très conscients du fait que la manière dont ils se répartissent les tâches peut être perçue comme genrés alors qu'ils ne le vivent pas forcément comme cela”, explique Abbie Goldberg, professeure de psychologie à la Clark University et autrice de Lesbian and gay parents (“les parents gay et lesbiens”).

Par exemple, si l'un des partenaires dans un couple gay fait la majorité de la cuisine, du ménage ou des lessives, des tâches perçues comme “féminines”, “il va faire en sorte d'évoquer des exemples qui contredisent la perception des personnes extérieures”, ajoute-t-elle. Celui qui passe plus de temps en cuisine se remémorera volontiers la fois où son “partenaire a fait des brownies incroyables quelques mois auparavant", nous explique Abbie Goldberg. 

Réinventer l'organisation de la vie quotidienne

Cette volonté consciente de vouloir déconstruire les codes “classiques” du modèle conjugal est une force puisque c'est un moyen pour les couples LGBT d'avoir un recul sur l'organisation de la vie quotidienne que les couples hétérosexuels n'ont pas nécessairement.

Stéphanie, 30 ans en couple avec Marie-Charlotte depuis 9 ans et mamans d'une petite Alix le reconnaît : “j'ai dû faire un gros travail pour prendre son rythme à elle, j'avoue qu'elle en fait toujours plus que moi.

L'étude menée par Abbie Goldberg démontre d'ailleurs, qu'au sein des couples de lesbiennes, la mère biologique a tendance à en faire davantage que la deuxième maman.

Un équilibre mis à mal après la naissance du premier enfant

Pourtant bien que la répartition des tâches soient plus équitables dans les couples de même sexe, cette dernière a tendance à se dégrader “à la naissance du premier enfant”, comme l'affirme Sébastien Chauvin.

Une conséquence inévitable qui touche de la même manière les couples hétérosexuels, comme nous le rappelle Abbie Goldberg. “La parentalité est un grand bouleversement au niveau des rôles et des responsabilités dans un couple. Fatalement, la quantité de travail augmente”, ajoute-t-elle.

Bien que la charge de travail supplémentaire que représente un enfant soit partagée par tous les couples, comment s'opère la nouvelle répartition des tâches ménagères ? Pour la professeure de psychologie il faut regarder au niveau des horaires de travail et du salaire de chaque partenaire.

Ce que l'on observe c'est que la personne qui gagne le plus s'implique moins dans les tâches liées à l'enfant”, souligne-t-elle. La répartition ne se fait donc pas par le biais du genre, mais à travers le pouvoir symbolique de l'argent.

Une forme d'injustice plus stressante pour les familles homoparentales

Un avis que ne partage pas Pierre qui a pris un congé paternité après la naissance de son dernier enfant. Non pas parce que son mari, “gagne un peu plus que lui”, mais parce qu'il y a 4 ans, lors de la naissance des jumelles, c'est Romain qui s'en était chargé.

Il est vraiment possible que cela soit le cas”, explique Abbie Goldberg, “mais parfois un manque d'égalité peut être perçu comme juste.” D'ailleurs, la professeure souligne que “l'absence de scripte” au sein des couples de même sexe rend “l'injustice au sein d'un couple” bien plus stressante pour les familles homoparentales, les inégalités ne pouvant être “justifiées” par la division de genre.

Alors comment parvenir à une égalité pure et parfaite ? “Il ne suffit d'avoir de la bonne volonté” souligne Sébastien Chauvin, “il faut avoir de la bonne volonté et beaucoup d'argent.” Familles homoparentales ou non, la clef de l'égalité serait d'embaucher du personnel !

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