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SOLIDARITÉ - L'association Un Toit c'est un droit milite pour que les logements vacants soient mis à disposition des personnes à la rue.

En France, depuis 30 ans, le nombre de logements vacants augmente. Selon l'INSEE, 10% des logements sont inhabités alors que le pays manque de toit : 4 millions de Français-es sont mal-logés, comme le rappelle chaque année dans son rapport la Fondation Abbé Pierre. Une situation ubuesque à l'heure où les associations réclament davantage de solutions d'hébergements pour les personnes sans-abri. 

À Rennes, l'association Un Toit c'est Un Droit, s'est fixée comme mission de convaincre les propriétaires de logements vides, de les mettre à disposition de celles et ceux qui vivent dans la rue. Une manière de pallier le manque d'hébergements d'urgence et de proposer aux occupants un logement décent, comme nous l'a expliqué Nicolas Mazard, coordinateur de l'association. 

On expérimente le dispositif de la convention, qui consiste à mettre à disposition un logement vide à une association qui en jouit gratuitement. Cela permet de loger des personnes à la rue dans de meilleures conditions que les nuitées hôtelières temporaires. Ici on est dans des logements dignes, les gens peuvent avoir une vie de famille pérenne”, souligne-t-il.

Convaincre les propriétaires de céder leur logement vacant 

Pour convaincre les propriétaires, l'association met en avant les économies que ces derniers peuvent réaliser en leur confiant leur bien. Car la plupart du temps, les logements en question ne sont pas sur le marché locatif. Les promoteurs qui ont racheté la maison sont en attente d'un permis de démolition pour la détruire et construire un immeuble à la place. “Pendant ce temps incompressible, le promoteur va murer la maison ou bien il engage une société de surveillance pour éviter qu'il n'y ait des squatteurs. Nous on propose de s'occuper de la maison et de l'habiter avec des gens qui en ont besoin”, précise Nicolas Mazard. 

En plus de payer l'assurance, Un Toit c'est un droit s'engage à entretenir les locaux, à gérer le gardiennage et à respecter la date de sortie fixée par le propriétaire. “Il sait qu'il peut récupérer son bien quand il le souhaite”, insiste le coordinateur de l'association. 

Un travail de négociation mené conjointement avec la fondation Abbé Pierre, qui permet aujourd'hui à l'association d'occuper 13 maisons et d'y loger 130 personnes. Des logements qu'il faut bien souvent rénover pour offrir des conditions de vie décentes aux occupant-es. Certes il y a des maisons en très bon état, “un petit coup de peinture et c'est bon”, nous dit Nicolas Mazard, mais parfois la facture peut grimper, surtout quand il s'agit de remise aux normes électriques ou de travaux de sécurisation pour les enfants. “Dans la dernière maison, les fenêtres étaient de plain-pied, sans garde-corps alors qu'il y a des enfants en bas-âge”, explique-t-il. La fondation Abbé Pierre et l'association financent les travaux de rénovation. 

© UTUD

Une colocation subie mais nécessaire pour se reconstruire 

Cette maison qui vient d'être rénovée accueille 11 personnes. Propriété de la région Bretagne, l'association occupait déjà depuis quelques temps avant qu'on leur propose une convention. Dans cette colocation “non-choisie”, le public est varié, nous apprend Nicolas Mazard : “on a toutes les situations administratives, des familles avec enfants, des célibataires.” Malgré cette diversité et la cohabitation qu'on leur impose, les relations entre les locataires se passent bien. “Les gens apprennent à se connaître entre communautés différentes, l'expérience est réussie”, assure-t-il. 

En revanche, les occupants ne paient pas de loyer. “Bien que certaines personnes touchent des aides, la plupart gagne à peine 80 euros par mois pour vivre”, rappelle le Rennais. Le logement devient un moyen de sortir de la précarité en trouvant un travail, puis un logement définitif. Car bien qu'il n'y ait pas de durée de séjour, la solution d'hébergement proposée par l'association est temporaire. 

Raison pour laquelle Un Toit c'est Un Droit espère voir son combat pour l'occupation des logements vides se généraliser. “À Rennes, on n'arrive plus à suivre. Il y a des centaines de gens dehors. Avec la fin de l'état d'urgence sanitaire, on estime qu'il y en aura 400 voire 500”, s'inquiète-t-il. Une inquiétude partagée par le collectif des Associations unies qui craint que la situation n'empire après le 10 juillet prochain, date de la fin d'état d'urgence sanitaire. “On doit le droit aux gens de se reconstruire !”, s'exclame Nicolas Mazard.