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NATURE - Jardiner avec ses voisins et consommer ses propres légumes en plein cœur de la capitale, c'est le projet d'Eva. Tous nos conseils pour le réaliser.

Il y a seulement 15 ans, cette jolie cour pavée était encore un parking. Aujourd'hui, les résidents de cette copropriété envisagent d'y cultiver leurs légumes. Surprenant, en plein 6e arrondissement parisien !

Mais Eva Boisrond en est persuadée, cet espace est idéal pour faire pousser des tomates. Il faut dire que le cadre est déjà très agréable, avec les oiseaux du parc du couvent adjacent en fond sonore.

La cour d'immeubles aujourd'hui.

La cour d'immeubles aujourd'hui. © Lisa Hör

Les 6 familles qui se partagent la cour se sont vite enthousiasmées pour ce projet. Mais comment le concrétiser ? Par où commencer ?

18h39 a sollicité les conseils de Gérald Kauffer, médiateur jardinier, au sein de l'agence d'aménagement urbaine Champ Libre, et Henri Bureau, co-président de l'Université populaire de permaculture.

La permaculture consiste à concevoir des habitats et des systèmes agricoles en s'inspirant de l'écologie naturelle. Bonne nouvelle pour Eva, qui tient à cette dimension environnementale : cela peut tout à fait s'appliquer dans un petit potager !

Définir un projet collectif

"Ne pas se précipiter, c'est le premier réflexe du bon permaculteur", commence Henri Bureau, avant de détailler les questions à se poser avant de se lancer :

  • combien de personnes sont prêtes à s'investir ?
  • la récolte sera-t-elle partagée ? l'objectif est-il de produire suffisamment pour devenir autonome en nourriture ?
  • qui va entretenir le potager pendant l'été ? “Si personne n'est là au mois d'août, on ne va pas planter les mêmes variétés”, précise Henri Bureau.

Pour ce projet, il s'agit surtout de jardiner pour le plaisir. Les voisins devraient se relayer sans trop de souci pour entretenir le jardin tout au long de l'année.

Dessiner son futur jardin

Pour déterminer l'emplacement du futur potager, Gérald Kauffer s'est rendu sur place. Dans cette cour, l'espace au pied des escaliers, qui dispose du meilleur ensoleillement, s'impose tout naturellement.

L'emplacement du futur potager.

L'emplacement du futur potager. © Lisa Hör

Mais Gérald Kauffer recommande de réunir tous les voisins autour de la table pour en discuter. “C'est important de consulter tout le monde, puis de faire un dessin de ce à quoi ressemblera le potager, pour avoir une ligne directrice”, explique-t-il.

Au fond de la cour, les pavés laissent place à un peu de terre nue. Pourrait-on y planter directement les légumes ? Hors de question ! Lorsqu'il apprend que des bâtiments industriels se trouvaient ici par le passé, Gérald Kauffer est catégorique.

"Il pourrait y avoir des produits pétroliers dans la terre, détaille-t-il. Plutôt que de la faire analyser, on va opter pour un potager en carrés." En ville, c'est la solution à privilégier.

Dessin du futur potager.

Dessin du futur potager. © Léna Piroux

Choisir son potager en carrés

Il en existe trois types :

  • Lorsqu'il est posé au sol, le potager en carrés est simplement constitué d'un cadre avec des bordures en bois, avec plusieurs petites cases à l'intérieur. Si on le construit soi-même, ne pas dépasser 1,20 m sur 1,20 m pour pouvoir atteindre le centre facilement sans tout piétiner.
  • Le potager en escalier est très esthétique. Mieux vaut prévoir un espace pour circuler autour, et accéder facilement à l'étage supérieur.
  • Le potager sur pieds, ou table de culture, qui évitent d'avoir à se plier en deux pour jardiner, qui ont la préférence de Gérald Kauffer.

Les potagers que l'on trouve dans le commerce permettent une profondeur de terre de 20 à 30 cm le plus souvent. C'est suffisant pour cultiver des fraises, des salades, de la ciboulette, du persil... tant que l'on évite les racines longues comme les carottes, aucun souci.

Comment disposer ses bacs ? Tout est possible. "On peut aligner plusieurs bacs sur deux rangées, pour avoir la sensation de rentrer dans un jardin", imagine Gérald Kauffer.

Si l'on installe les bacs le long d'un mur, faire attention à ce qu'ils ne soient pas trop larges, de façon à pouvoir atteindre l'autre côté sans problème.

Potager bio : permaculture et compost

Une chose est certaine, aucun engrais chimique ne viendra polluer ce jardin. Pour recréer un sol favorable, Henri Bureau préconise la méthode des "lasagnes" : alterner des couches de compost vert (par exemple des herbes de tonte) et de compost brun (comme des feuilles mortes). On commence par placer de la paille ou du bois mort, non traité, au fond. Entre chaque couche de compost, on déverse un peu de terre ou de terreau.

Les matières organiques vont se décomposer et descendre, donc ne pas hésiter à prévoir plus de terre au milieu, pour obtenir un petit dôme.

On termine avec du fumier. Difficile d'en trouver à Paris ? "Il y a des centres équestres... Pourquoi ne pas demander à la Garde Républicaine, sourit Henri Bureau. Sinon, un petit week-end à la campagne, et on en ramène dans le coffre de sa voiture !"

Ensuite, pour alimenter son jardin tout en recyclant ses déchets de cuisine, rien de mieux que d'installer un composteur dans la cour, ou encore plus audacieux... un lombricomposteur.

>> Pour que d'adorables vers vous aident à fertiliser votre jardin : fabriquez votre lombricomposteur en suivant notre tutoriel.

Enfin, dernière question : ce potager nécessitera-t-il beaucoup d'entretien ? Cela dépend bien sûr des légumes et aromates que l'on aura plantés. Gérald Kauffer se veut rassurant : "En permaculture, il n'y a pas besoin de beaucoup arroser, surtout si on met de la paille sur le dessus pour garder la terre humide."

Le grand avantage d'avoir un potager au pied de son immeuble : pouvoir plonger ses mains dans la terre le soir en rentrant du travail, ou même pourquoi pas... la nuit !