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INVENTION - Eliott Sarrey, a mis au point un robot jardinier qui lui a valu le prix Google de l'innovation. Rencontre avec un petit génie de la robotique.

J'ai loupé votre appel hier, je fêtais le brevet comme il se doit avec les copains”, s'excuse poliment Eliott Sarrey, pour avoir laissé filé l'heure du rendez-vous. Car à quinze ans, aussi doué en robotique soit-il, Eliott n'en reste pas moins un adolescent comme les autres, qui fête l'obtention de son premier grand examen scolaire, obtenu, de surcroît, avec une mention très bien.

S'il a gardé des préoccupations adolescentes, Eliott vit pourtant depuis un an, un rêve aux couleurs de Google. En mars 2015, Eliott s'est mis en tête de mettre sur pied un robot jardinier.

J'ai eu cette idée car j'ai plusieurs voisins ont la main verte alors que nous, on n'arrive pas trop à s'occuper du jardin. Je me suis dit qu'il fallait faire quelque chose”, explique malicieusement le jeune garçon.

Ce quelque chose est donc un robot jardinier qui effectue les tâches jardinières les plus répétitives. “Il bine ou arrose mais laisse la récolte à l'utilisateur”, confie Eliott.

Une fois l'idée germée, Eliott le modélise sur son ordinateur avant de développer un prototype. C'est ce dernier qu'il enverra à la firme californienne afin de participer au concours international Google Science Fair. Un concours, dont la première édition a eu lieu en 2011 et qui rencontre depuis un franc succès, plusieurs milliers de projets ayant été soumis aux utilisateurs.

Le seul Français en lice

A la fin de l'été, la nouvelle tombe : Elliot fait partie des 90 jeunes âgés de 13 à 15 ans à avoir été retenus dans le monde. Après un dernier écrémage, il n'en reste que 20, qui s'envolent en septembre pour la Californie, dont Eliott, seul français encore en lice.

Une première traversée de l'Atlantique pour l'adolescent de Meurthe-et-Moselle, qui a encore en tête la démesure du pôle du géant américain.

On ne voyage pas énormément, alors c'était fou de prendre un A380 et de se retrouver sur le campus le Google”, explique le jeune homme. “C'est comme on peut l'imaginer, avec des transats, un énorme jardin, de la nourriture à disposition toute la journée. Il fait toujours beau et tout, absolument tout, est aux couleurs de Google”.

Sur place, pendant que son père, Michaël, qui l'accompagne sillonne les alentours avec les autres parents, Eliott présente son projet au jury, le tout en anglais, une langue qu'il ne maîtrise pas encore à la perfection.

Je parle anglais avec mon niveau de 3ème mais j'ai acquis un petit vocabulaire technique grâce à mes recherches sur l'ordinateur. Heureusement j'étais assisté par un interprète.” De quoi donner envie au jeune homme de perfectionner sa maîtrise de cette langue et de retourner, une fois le bac en poche, pour les Etats-Unis.

© Eliott Sarrey

Une dotation de 10 000 euros et d'une année de mentorat

Son robot, déjà récompensé par le Prix du président du Concours Lépine à la Foire internationale de Strasbourg, a séduit les géants du web pendant le grand oral. Eliott s'est donc vu remettre le premier prix, doté de 10 000 euros et d'une année de mentorat.

Les 10 000 euros, ce sont une bourse d'étude. Je dois faire une demande et ensuite Google paiera l'établissement que j'ai sélectionné s'il m'accepte. Je n'ai pas reçu cet argent sur mon compte en banque comme j'ai pu le lire à droite à gauche”, rectifie Eliott, amusé.

En janvier, le mentorat Google a débuté sous la tutelle de deux Googleurs, auxquels il peut poser tout un tas de questions, via Skype, concernant le développement de son robot, qui lui permettent d'orienter son travail et ses recherches.

Mais la question à laquelle lui seul peut répondre est l'avenir qu'il entend donner à Bot2karot, son robot jardinier.

Je me pose la question d'une commercialisation, mais l'année prochaine je vais au lycée et il est hors de question que j'arrête l‘école pour ça. Est-ce que ça vaut le coup ? Est-ce qu'il faut monter une start-up ? En fait ça ne m'intéresse pas trop de jouer au chef d'entreprise. Ce que je préfère c'est créer et trouver des solutions”, explique Eliott.

Quelques améliorations techniques

Lorsqu'on l'interroge sur ses facultés en robotique et sur l'apparente facilité avec laquelle il raconte la construction de son robot, comme s'il s'agissait d'un simple jeu d'adresse, Eliott répond du tac au tac.

Dire “je n'ai pas les connaissances” ou “je ne peux pas le faire”, c'était bien il y a vingt ans quand il n'y avait pas internet mais aujourd'hui on peut tout apprendre tout seul, notamment avec les tutos en ligne, et la communauté de makers qui s'est constituée sur le net”, assène-t-il, avant d'avoir un petit mot pour son père, qui lui a toujours permis de bidouiller dans son atelier et préfère “lui acheter une fraiseuse qu'une console de jeu.”

Pour les mois à venir, Eliott va poursuivre son monitorat et finir la deuxième version de son robot puis en ébaucher une troisième, avec quelques améliorations mécaniques pour permettre à Bot2karot d'être debout, en station verticale

Une vie dans la continuité de celle qu'il avait avant de remporter le prix Google, avec pour seule différence, de nombreux mails qui lui arrivent désormais, notamment de développeurs de robot maraîchers.

Sinon, il est vrai que je passe plus de temps avec des personnes qui bricolent”, confie Eliott. Une conclusion à l'image de son humilité, Eliott faisant bien plus, vous l'aurez compris, que “bricoler”.